mooc-img-1 Massive Open Online Course

Dossier MOOC – approche alternative.
Ce qui suit :
Part 2, Définition d’un MOOC,
Part 3, Vers de nouvelles formes de pédagogies,
Part 4, La place et le rôle de l’enseignant.

 

Introduction et contexte

Sujet brûlant du moment : les MOOC (Massive Open Online Course). Un acronyme, certes barbare (prononcez « MOC », in french)*, mais derrière lequel se cache surtout ce qui pourrait bien démocratiser définitivement l’accès au savoir et être à l’origine d’une modification radicale de l’enseignement et de l’éducation.

 

De multiples enjeux

Car, dans leurs applications les plus abouties et audacieuses, du moins tel qu’ils seront considérés ici (le cadre théorique fluctuant largement, en effet, au rythme des opportunités que certains voient se dessiner dans cette économie du savoir), les MOOC constituent bien plus que le simple passage du système éducatif aux outils numériques. Ils représentent une remise en question totale de son modèle (les méthodes et techniques d’apprentissage, l’évaluation, le système de valeur, les interactions entre les individus, les structures hiérarchiques, la propre légitimité des établissements du supérieur dans la transmission de connaissances, leur influence ici et ailleurs, la place de l’enseignant, etc.) autant qu’ils relèvent de multiples enjeux ; tout à la fois économiques, culturels et sociaux. Touchant en profondeur la structure et l’organisation même de nos sociétés, toujours un peu plus vacillantes.

Il est de bon ton d’évoquer un changement de paradigme en de telles circonstances ; souvent de manière excessive d’ailleurs. Il semblerait bien, toutefois, que l’expression n’est jamais été aussi bien adaptées. Internet (ou le web ; précisons tout de suite aux puristes qu’aucune distinction ne sera faite entre les deux termes) n’aura finalement, depuis ses origines, épargné aucun champ de l’activité humaine ; aucune institution. Même celles restées longtemps préservées à l’ombre de leurs traditions séculaires (ne restera plus qu’à faire éclater définitivement les institutions politiques… Les plus résistantes !). « Nos institutions luisent d’un éclat qui ressemble, aujourd’hui, à celui des constellations dont l’astrophysique nous apprit jadis qu’elles étaient mortes déjà depuis longtemps », nous dit, par exemple, Michel Serres dans Petite Pucette…

Internet change le monde, de force, inexorablement, par petits soubresauts successifs, par ce mouvement irréversible que Francis Pisani et Dominique Piote désignent, dans Comment le Web change le monde, par « alchimie des multitudes ».
Spécificités majeures, plutôt appropriées à notre affaire de MOOC : la mise en relation d’un nombre toujours plus grand de personnes et de données favorisant l’émergence spontanée de propriétés nouvelles, les notions de conservation comme nouvelle main invisible et d’organisation liquide sans frontières (géographiques, culturelles et sociétales) ni hiérarchie.
Dans ce contexte percent d’autres vecteurs de tension. Aussi, cette nouvelle dynamique relationnelle, à laquelle il devient plus que jamais nécessaire d’adhérer, se heurte violemment à la mécanique institutionnelle ; une mécanique à fort degré d’inertie.

 

La transmission du savoir

Les MOOC posent également la question de la transmission du savoir dans un monde où celui-ci est désormais accessible à tous, à tout moment et en tout lieu (sans même bouger ses fesses) grâce à Internet et aux nouveaux supports mobiles ; il est toujours et partout déjà transmis. Une somme de connaissance à portée de clic, immédiate et objectivée en ce qu’elle n’a plus de référents propres, qu’ils soient espace « concentré » (une université, un amphi, etc.), objets (de livres en bibliothèques, dictionnaires), de personne (un enseignant) ou de patrie (l’histoire, la tradition, la culture dominante, l’idéal paternalisme d’éducation des masses, etc.) presque clos à ce qui les entourent.
Pour reprendre l’énoncé de Michel Serre, comment, dès lors, transmettre le savoir ; que transmettre ; à qui le transmettre

Les MOOC apparaissent, techniquement et par les multiples projets et opportunités économiques qu’ils engendrent, comme une tentative de réponse concrète à ces questions et aux bouleversements de notre époque. Ceux-ci impliquent autant le rôle et la place de l’enseignant dans le processus d’acquisition des connaissances que la manière dont l’apprenant peut y être intégré.

 

Les mutations en cours

D’abord, l’éclatement des clivages culturels, sociaux et nationaux, la disparité des goûts et des pratiques culturelles (entre haute-culture, sous-culture et culture familiale), la multiplication des sources d’information et des modes de diffusion brouillent, selon Bernard Lahire (Sociologie des pratiques culturelles), le découpage des frontières symboliques entre les groupes sociaux et tendent à éroder le socle de connaissances et de valeurs communes.
Ensuite, dans un contexte où, d’une part, le mode de lecture linéaire cède sa place à l’hypertexte et où, d’autre part, les nouvelles technologies prennent peu à peu le pas sur les facultés de notre cerveau, au final « externalisées » (une extension de notre mémoire), l’accumulation de connaissances compte finalement moins que les capacités à développer des compétences techniques et conceptuelles ou à établir des connexions entre les différents champs du savoir. A ce titre, Georges Siemens évoque un méta-apprentissage devenant aussi important que l’apprentissage lui-même ; au « savoir-faire » et « savoir-quoi » s’ajoute le « savoir-où » (savoir où trouver les connaissances quand c’est nécessaire).
A tel point que ce « j’aime mieux forger mon âme que de la meubler » de Montaigne, dans une époque où l’écriture et l’imprimerie s’étaient déjà posées en rupture des modes de transmission et d’acquisition du savoir précédents, n’aura jamais été aussi approprié et nécessaire.

Les problématiques et les enjeux sont multiples et solidement nouer les uns aux autres. Nous tenterons modestement de participer un peu au débat et d’apporter quelques pistes de réflexion, conscients qu’un tel sujet est beaucoup trop vaste et complexe (et brûlant !) pour s’improviser.

A l’instar d’un MOOC d’approche « connectiviste » (nous verrons de quoi il en retourne précisément..) et parce que nous nous voulons fermement ancrés à notre époque (!), il sera d’ailleurs question de nous faire plutôt « agrégateur » de contenu ; l’essentiel des questions soulevées trouveront réponse au fils de liens hypertextes qui jalonneront ce dossier…

 

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* Les amoureux de la langue française préfèreront le terme de CLOM (Cours en Ligne Ouverts et Massif) ; d’autres encore, dans une volonté de rupture, auront plutôt recours aux DOOC (Distributed Open Online Courses) et COOC (Contributive Open Online Courses) ; enfin les plus intimistes choisiront les SPOC (Small Private Online Classes)… Un débat de chaque instant, donc !

 

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